France, Sahara, Palestine… Nasser Bourita, chef de la diplomatie, fait le point sur les grands enjeux internationaux du Maroc !
Nasser Bourita, chef de la diplomatie marocaine, a fait le point lors d’une interview sur les grands enjeux internationaux de Rabat.
Publié : 4 novembre 2024 à 14h58 par La rédaction
Crédit : Ministère des Affaires Etrangères - Facebook
À l'occasion de la visite d'État du président de la République Emmanuel Macron au Maroc, Nasser Bourita, ministre des Affaires étrangères du royaume, s'est exprimé dans un entretien exclusif au magazine le Point, sur les grands dossiers diplomatiques qui animent Rabat.
Du partenariat renouvelé avec la France à la question du Sahara occidental, en passant par les relations avec l'Algérie et les enjeux au Sahel, Nasser Bourita a partagé la vision du Maroc sur ses priorités internationales et régionales.
Un partenariat renforcé avec la France
Selon Nasser Bourita, la visite d'Emmanuel Macron marque un tournant dans les relations franco-marocaines. Les deux chefs d’État ont signé une déclaration commune posant les bases d'un « partenariat d'exception renforcé ».
Ce document, conçu autour des principes de transparence, solidarité et égalité entre États, définit des domaines prioritaires comme les énergies renouvelables et la modernisation des infrastructures ferroviaires et portuaires. « Cette visite marque le début d'un nouveau chapitre », a-il-affirmé, évoquant la supervision directe de ce partenariat par le roi Mohammed VI et le chef d’Etat Emmanuel Macron.
Cette alliance repose sur une approche de « doing with Morocco », et vise à construire des projets qui valorisent les entreprises marocaines. Les initiatives dans le domaine de l'hydrogène vert et de la ligne à grande vitesse incarnent cet esprit de collaboration.
La position de la France sur le Sahara, un soutien essentiel
La question du Sahara occidental reste un enjeu majeur pour le Maroc. La France a affirmé son soutien au plan d'autonomie marocain comme « la seule base réaliste » pour résoudre ce différend. Cette position, est réitérée dans une lettre récente d’Emmanuel Macron adressée au roi Mohammed VI le 30 juin dernier.
Nasser Bourita rappelle que l'impasse dans ce conflit a un coût élevé pour la stabilité régionale. « Il manque un partenaire sérieux pour progresser vers une solution », déplore-t-il. Selon lui, le maintien du statu quo alimente l’insécurité au Maghreb.
Migration : une coopération franco-marocaine renforcée
Sur la question de la migration, Nasser Bourita insiste sur la notion de « responsabilité partagée ». Le Maroc collabore activement avec la France pour faciliter le retour des migrants marocains en situation irrégulière, en accélérant l’émission de laissez-passer.
« Les consulats marocains coopèrent étroitement avec les préfectures de police pour assurer une identification rapide des personnes », précise-t-il. Pour le ministre, le Maroc souhaite préserver une image positive de sa diaspora en France, tout en s’engageant à reprendre ses ressortissants en situation irrégulière.
Concernant les mineurs non accompagnés, un sujet sensible en Europe, Nasser Bourita souligne les efforts de Rabat pour identifier les jeunes pouvant être rapatriés. En 2018, une mission marocaine en France a constaté que deux tiers des mineurs non accompagnés présumés marocains n’étaient pas d’origine marocaine, une complexité exploitée par les réseaux de trafic humain.
Une coopération active au Sahel et en Afrique
La stabilité de la région du Sahel est une priorité pour le Maroc, qui a mis en place une série d’initiatives pour soutenir les pays sahéliens. Le royaume a notamment investi dans la formation de leaders religieux et lancé des projets de développement pour désenclaver la région.
Dans le cadre de l'Initiative Atlantique, le Maroc offre aux pays sahéliens l'accès à ses infrastructures logistiques et ses ports, avec des perspectives de développement économique sur le long terme. Trois réunions ministérielles ont déjà eu lieu dans ce cadre, et un document de référence est en cours de validation pour officialiser cette coopération.
La France, également engagée au Sahel, collabore avec le Maroc sur ces initiatives, malgré des approches différentes. « L’objectif commun reste la stabilisation du Sahel, avec respect pour les choix de ses peuples et la volonté de promouvoir leur développement », explique-il.
Relations avec l’Algérie : le Maroc prône une diplomatie autonome
Interrogé sur les relations de la France avec l'Algérie, Nasser Bourita souligne que le Maroc ne se mêle pas des liens que ses partenaires entretiennent avec d’autres pays. « Si l'Algérie perçoit le renforcement de nos relations avec certains pays comme une menace, cela relève de son interprétation », insiste-t-il. Pour Rabat, les relations bilatérales avec ses partenaires ne dépendent pas des dynamiques régionales.
Israël et Palestine : une diplomatie d'équilibre
Alors que le Maroc a repris ses relations diplomatiques avec Israël en 2020 dans le cadre de l'accord tripartite Maroc-États-Unis-Israël, Nasser Bourita rappelle que cette coopération ne remet pas en cause le soutien de Rabat à la cause palestinienne. « Contrairement au Moyen-Orient, notre pays porte en lui un héritage juif ancré dans son identité nationale. C'est un modèle inspirant de coexistence où la religion n'est pas un obstacle ».
Le roi Mohammed VI, en tant que président du Comité Al Qods, a réaffirmé dès le rétablissement des liens avec Israël que cette démarche « ne signifie pas un renoncement à la cause palestinienne, bien au contraire ».
La position marocaine sur la question palestinienne demeure sans ambiguïté et, comme l’a exprimé le Roi du royaume, elle est « une priorité ». Le Maroc a également fermement condamné les attaques israéliennes contre les civils palestiniens, qualifiant les violences contre « les hôpitaux et les écoles » d’inadmissibles.
Nasser Bourita précise que le Maroc œuvre discrètement pour soutenir des initiatives de paix au Moyen-Orient, dans le respect des droits inaliénables des Palestiniens et en faveur d'une solution à deux États.