Maroc : découverte d’un complexe agricole vieux de 5 000 ans à Oued Beht, l’un des plus anciens et vastes d’Afrique !

1er octobre 2024 à 14h24 par La rédaction

Une découverte archéologique majeure à Oued Beht, au Maroc, met en lumière une société agricole complexe vieille de 5 000 ans.

Oued Beht
Crédit : SNRT

Des fouilles révèlent l’existence d’un vaste complexe agricole au Maroc. À une centaine de kilomètres de Rabat, dans la province de Khémisset, des archéologues ont mis au jour un site exceptionnel, révélant une ancienne société agricole prospère et complexe datant de 5 000 ans.

Cette découverte, réalisée sur le site archéologique d’Oued Beht, est considérée comme le plus vaste complexe agricole de cette époque jamais identifié en Afrique, en dehors du célèbre corridor du Nil.

Une découverte inestimable pour l’archéologie africaine

Les recherches, menées par une équipe internationale de scientifiques, ont permis de mettre au jour des vestiges qui apportent un éclairage nouveau sur l’importance du Maghreb durant la période néolithique. « Tous les indicateurs montrent la présence d’un établissement agricole à grande échelle, comparable à celui de Troie à l’aube de l’âge du bronze », souligne l’étude publiée dans la prestigieuse revue britannique Antiquity.

Cette étude, réalisée par des chercheurs de renom comme Youssef Bokbot (Institut national des sciences de l’archéologie et du patrimoine), Cyprian Broodbank (Université de Cambridge) et Giulio Lucarini (Conseil national de la recherche d’Italie), réexamine l’histoire de la préhistoire tardive en Afrique du Nord-Ouest, longtemps négligée par l’archéologie méditerranéenne.

Des vestiges témoignant d’une société prospère

Les fouilles ont révélé de nombreux artefacts, dont plus de 3 000 outils en pierre, 50 haches et herminettes, 371 objets taillés, ainsi que 1 295 fragments de poteries. Parmi les découvertes, des fosses de stockage profondes, probablement utilisées pour conserver du blé et de l’orge, indiquent que l’agriculture intensive était au cœur de l’économie de cette société.

Les restes de plantes cultivées et d’animaux domestiqués confirment que les pratiques agricoles étaient bien établies, suggérant une civilisation avancée. « Ces découvertes prouvent que cette société africaine avait déjà développé des méthodes agricoles sophistiquées, bien avant l’émergence d’autres civilisations majeures comme l’Égypte pharaonique », explique Abdeljalil Bouzouggar, directeur de l’Institut national des sciences de l’archéologie et du patrimoine.

Des liens transméditerranéens précoces

L’un des aspects les plus fascinants de cette découverte est la mise en évidence de liens anciens entre le Maghreb et la péninsule ibérique. Les archéologues ont relevé des similitudes frappantes entre les pratiques agricoles et les objets retrouvés à Oued Beht et ceux découverts en Ibérie. « La culture du silo, ainsi que la poterie peinte, présentent des ressemblances avec celles que l’on retrouve de l’autre côté de la Méditerranée », expliquent les chercheurs.

Ces échanges transméditerranéens, autrefois datés du début de la navigation en haute mer, aux alentours de 2 400 avant J.-C., ont en réalité débuté bien plus tôt. « Les résultats des fouilles modifient la chronologie des échanges commerciaux entre le Nord-Ouest africain et la Méditerranée occidentale », précise Youssef Bokbot qui n’exclut pas la possibilité de liens avec d’autres régions méditerranéennes, notamment Chypre, qui pourraient être explorés lors de futures campagnes de fouilles.

Une contribution significative à l’histoire méditerranéenne

Cette découverte majeure invite à réévaluer le rôle du Maghreb dans la formation des sociétés méditerranéennes anciennes. « Pendant trop longtemps, l’Afrique a été perçue comme un simple récepteur d’influences extérieures, mais cette découverte prouve que les Africains ont joué un rôle actif et central dans les premiers échanges culturels et économiques de la région », déclarent les chercheurs dans leur article.

La prochaine campagne de fouilles, prévue en février 2025, promet de révéler davantage sur cette société méconnue. Les archéologues espèrent découvrir des sépultures, déterminer les limites du village et explorer une mine de sel située à proximité, un élément clé de l’économie locale.