Bruneau Retailleau veut interdire le voile aux accompagnatrices de sorties scolaires !

Le ministre de l'Intérieur souhaite étendre la loi sur les signes religieux pour inclure les sorties scolaires, malgré les limites juridiques et politiques actuelles.

Publié : 8 janvier 2025 à 16h49 par La rédaction

Bruno Retailleau
Bruno Retailleau
Crédit : Bruno Retailleau - Facebook

Bruno Retailleau, ministre de l’Intérieur, a réaffirmé sa volonté d’interdire le port du voile pour les accompagnatrices de sorties scolaires, qu'il considère comme une extension de « l'école hors les murs ». Cette déclaration, faite le 7 janvier sur RTL, relance un débat ancien sur la laïcité et la neutralité religieuse dans les espaces publics.

Une « priorité » pour le ministre de l'Intérieur

Bruno Retailleau justifie sa position en qualifiant le voile d’« étendard pour l’islamisme » et de « marqueur de l’infériorisation de la femme par rapport à l’homme ». Pour lui, l’application de la loi de 2004, qui encadre le port de signes religieux dans les établissements scolaires, doit être élargie aux sorties éducatives. « Les sorties scolaires, c’est l’école hors les murs », insiste-t-il, appelant à une réforme législative pour imposer cette interdiction.

Bruno Retailleau considère également cette mesure comme un outil de lutte contre « l’islamisme des Frères musulmans », qu’il accuse de faire de « l’entrisme » dans les institutions françaises. Cette lutte, qu’il qualifie de priorité pour les mois à venir, vise à renforcer les principes de laïcité dans d’autres espaces publics, comme les compétitions sportives ou encore les universités.

Un cadre juridique en opposition

Pourtant, la position du ministre se heurte à l’avis du Conseil d’État, qui, en 2013, avait statué que les parents accompagnateurs ne sont pas soumis à l’obligation de neutralité religieuse imposée aux agents du service public. L'institution estime que cette liberté religieuse doit être respectée, sauf si elle perturbe le bon fonctionnement du service public de l’éducation. Dans ce cas, il revient aux directeurs d’établissement de demander aux accompagnateurs de ne pas afficher de signes religieux ostensibles, mais sans obligation légale.

Cette opposition entre la volonté politique et le cadre juridique complique toute initiative en ce sens. Bruno Retailleau lui-même reconnaît les difficultés législatives, rappelant un amendement qu’il avait fait adopter au Sénat en 2021 dans le cadre de la loi « séparatisme ». Bien qu’approuvé par les sénateurs, cet amendement visant à interdire les signes religieux pour les accompagnateurs avait été rejeté à l’Assemblée nationale.

Les limites politiques

En dépit de ses efforts pour relancer ce projet, le locataire de la Place Beauvau reconnaît qu’il est difficile de le concrétiser en l’absence d’une majorité parlementaire favorable. « Je vois bien qu’il y a une difficulté sur ce genre de chose », a-t-il admis. Cette absence de consensus politique, combinée aux contraintes juridiques, rend improbable une adoption rapide de cette réforme.

Une question sensible et controversée

La question du port du voile dans les sorties scolaires divise profondément l’opinion publique et les acteurs politiques. Déjà en 2012, une circulaire de Luc Chatel, alors ministre de l’Éducation, avait interdit le port de signes religieux pour les accompagnateurs, mais cette mesure n’avait pas de fondement législatif solide. La Haute autorité de lutte contre les discriminations, aujourd’hui dissoute, avait même jugé cette interdiction contraire au principe de non-discrimination.

Depuis, le débat refait surface régulièrement, souvent porté par des acteurs politiques de droite. Pour ses détracteurs, cette insistance sur le voile risque de stigmatiser une partie de la population et de détourner l’attention d’autres enjeux éducatifs. Pour ses défenseurs, il s’agit d’un combat essentiel pour préserver les principes de laïcité et lutter contre les influences religieuses dans l’espace public.

Une mesure étendue aux universités ?

En parallèle, Bruno Retailleau s’est prononcé en faveur d’une interdiction du voile à l’université, un autre sujet controversé. Selon lui, « le terreau du terrorisme, c’est le séparatisme et l’islam politique ». Il précise toutefois que cette lutte ne vise pas la religion musulmane elle-même, mais « une idéologie politique qui défigure cette religion ».