Immigration zéro : bénéfice ou menace pour l’économie française ?
Contrairement aux idées reçues, l'immigration en France est un levier de croissance et non une menace pour l'économie ou l'emploi.
Publié : 26 décembre 2024 à 10h54 par La rédaction
L’immigration zéro. Cette expression revient régulièrement dans le débat public, souvent présentée comme une solution miracle aux défis économiques et sociaux.
Pourtant, selon les économistes, cette idée relève davantage de l'illusion que de la réalité. Loin d’être un poids, l’immigration contribue à l’économie française en comblant des besoins essentiels dans plusieurs secteurs.
Un écart entre perception et réalité
En France, les étrangers non-européens représentent seulement 5% de la population, loin des 15 à 20% perçus par une partie de l’opinion publique.
Cet écart significatif entre les faits et les idées reçues alimente des débats souvent déconnectés de la réalité. Comparée à d’autres pays européens, la France est loin d’être la principale terre d’accueil des immigrés.
Des secteurs qui dépendent des travailleurs étrangers
Loin des clichés, les travailleurs immigrés occupent principalement des emplois dans des secteurs où la main-d’œuvre fait cruellement défaut : le BTP, la restauration et l’aide à la personne. Ces métiers, souvent exigeants avec des conditions difficiles et des rémunérations peu attractives, peinent à trouver des candidats parmi les Français nés dans l’Hexagone.
Selon l’Insee, dans le secteur de la construction, 28% des hommes immigrés non européens sont employés, contre seulement 10% des hommes sans ascendance migratoire directe. De même, dans les services aux ménages, 16% des femmes immigrées non européennes occupent ces emplois, contre 7% des femmes sans ascendance migratoire.
Dans la santé, 10% des femmes immigrées non européennes travaillent comme aides-soignantes ou auxiliaires de vie. Enfin, dans l’hôtellerie et la restauration, les travailleurs immigrés non européens constituent une main-d’œuvre essentielle pour pallier la pénurie de personnel.
Mais une question persiste : ces travailleurs étrangers prennent-ils le travail des locaux ? La réponse des experts est sans appel : non ! Les études montrent que l’immigration n’a pas d’effet négatif sur l’emploi ou les salaires des Français. En réalité, la concurrence sur le marché du travail se concentre principalement entre différentes vagues d’immigration, plutôt qu’entre immigrés et natifs.
Pourtant, certains responsables politiques soutiennent des mesures plus restrictives. Valérie Pécresse, sur CNEWS, a affirmé le 12 octobre 2021 : « Il faut réduire l'immigration légale ». De son côté, Éric Zemmour a déclaré sur RTL qu’il souhaitait « arrêter les flux et mettre l’immigration à zéro ». Cette vision tranche avec les analyses économiques qui mettent en avant les bénéfices de l’immigration pour le pays.
L’immigration, un moteur pour l’économie
L’idée d’une « immigration zéro » pourrait-elle relancer l’économie française ? Selon les économistes, c’est tout l’inverse. Anthony Edo, économiste au Centre d'études prospectives et d'informations internationales (Cepii), qui conseille Matignon, explique dans une interview qu’il a accordé à Cash investigation que « plus il y a d’immigration, plus il y a de croissance économique ». Les travailleurs immigrés comblent des pénuries dans des secteurs clés, participent à la création de richesse et soutiennent des activités essentielles à la société.
Toutefois, la question divise profondément. Bruno Retailleau, sur LCI, a soutenu que « l’immigration est un des phénomènes qui a le plus bouleversé la société française depuis 50 ans » et qu'il « pense que l'immigration n’est pas une chance ». Ces propos reflètent une opinion partagée par une partie de la population, mais qui contraste avec les réalités économiques démontrées par les experts.
En outre, réduire l’immigration reviendrait à se priver de talents variés : des médecins, des ingénieurs, des entrepreneurs. Ces profils contribuent non seulement à l'économie, mais aussi à l'innovation et à la qualité des services publics.
La nouvelle loi sur l'immigration annoncée pour 2025 suscite déjà des débats. Parmi les mesures envisagées, l’allongement de la durée maximale de rétention administrative des étrangers en situation irrégulière, portée de 90 à 210 jours.
Le ministre de l’intérieur démissionnaire Bruno Retailleau, partisan de cette mesure, affirme vouloir renforcer la sécurité, tandis qu’Olivier Faure dénonce une politique dictée par l’extrême droite.
Une richesse humaine et économique
L’immigration ne se résume pas aux chantiers ou aux métiers pénibles. C’est aussi des vies sauvées dans les hôpitaux, des start-ups créées, des innovations portées par des talents venus d’ailleurs.
L'immigration zéro reste une chimère, tant sur le plan économique que social. La clé pour l’avenir ne réside pas dans l’exclusion, mais dans une meilleure intégration et la valorisation des apports de tous.