Paris : l’avenue Bugeaud, figure de la colonisation algérienne, rebaptisée Hubert-Germain !
18 octobre 2024 à 18h02 par La rédaction
C’est une décision symbolique, l'avenue Bugeaud à Paris devient l'avenue Hubert-Germain, hommage au dernier compagnon de la Libération.
L'avenue Bugeaud, située dans le XVIe arrondissement de Paris, a officiellement changé de nom lundi 14 octobre pour devenir l'avenue Hubert-Germain.
Ce changement rend hommage à la mémoire du dernier compagnon de la Libération, décédé en 2021, et remplace le nom du maréchal Bugeaud, figure contestée de la colonisation de l'Algérie au XIXe siècle. La cérémonie d’inauguration a été présidée par la maire de Paris, Anne Hidalgo.
Un choix pour réhabiliter la mémoire de la Résistance
Hubert Germain, né dans le XVIe arrondissement de Paris, a rejoint les Forces françaises libres dès juin 1940 et a participé au débarquement de Provence en 1944. Anne Hidalgo a déclaré vouloir « rendre un dernier hommage » à cet homme qui a incarné l’esprit de la Résistance, qualifiant ce changement de nom de geste symbolique pour la ville de Paris. « L’ultime survivant des Compagnons de la Libération » voit ainsi son nom gravé dans le paysage parisien, remplaçant celui du maréchal Bugeaud.
Une décision marquée par la controverse autour de Bugeaud
L’annonce de la débaptisation de l’avenue Bugeaud remonte à novembre 2023. Ce changement de nom avait été justifié par le passé controversé de Thomas Bugeaud, notamment pour son rôle lors de la conquête de l’Algérie dans les années 1830-1840. La mairie de Paris l’accuse de s’être « rendu coupable de ce qui serait aujourd’hui qualifié de crimes de guerre ».
Thomas Bugeaud avait également participé à la répression de l’insurrection républicaine de 1834 à Paris, marquant son passage par des méthodes de maintien de l'ordre particulièrement violentes. Pour le Conseil de Paris, cette figure militaire est désormais synonyme de « discrédit », justifiant le besoin de modifier le nom de l'avenue.
Une décision votée à l'unanimité, malgré des réticences
Le changement de nom a été voté à l’unanimité par le Conseil de Paris le 11 juillet 2024, bien que certains élus aient exprimé des réserves sur la pratique de débaptiser des rues. Francis Szpiner, élu LR, a notamment critiqué cette décision, jugeant qu’« il est important de dénoncer le colonialisme, mais effacer totalement son souvenir est absurde et ne servira à personne ». Il a appelé à privilégier l’explication et la contextualisation des figures historiques plutôt que leur effacement.
Malgré ces objections, la mairie a insisté sur le caractère exceptionnel de ces décisions. Il s'agit du cinquième lieu débaptisé à Paris depuis 2001. Les précédents incluent, par exemple, le collège Vincent-d’Indy, renommé en 2013 en raison des positions antisémites de son ancien patronyme, ou encore la rue Alexis-Carrel, débaptisée en 2003 pour ses sympathies pro-nazies.
Un regard critique sur l’histoire coloniale
La figure de Thomas Bugeaud, autrefois célébrée pour son rôle de militaire, est aujourd’hui associée à une des périodes les plus sombres de la colonisation française en Algérie. Sa nomination au poste de gouverneur de l'Algérie en 1840 a marqué le début d'une politique de répression féroce.
Des historiens et des personnalités publiques, comme le journaliste Jean-Michel Aphatie, ont critiqué cette glorification. Il avait notamment signé une tribune avec l'historien Olivier Le Cour Grandmaison, qualifiant Thomas Bugeaud de « boucher » pour ses actions en Algérie.
Les anciennes plaques conservées au musée Carnavalet
Les anciennes plaques de l'avenue Bugeaud ne disparaîtront pas complètement du patrimoine parisien. Elles seront conservées au musée Carnavalet, dédié à l’histoire de Paris.